Reiki dojo :: Réflexions sur l'histoire du reiki traditionnel


Avant d'exposer ma réflexion, je tiens à préciser que je ne cherche en aucun cas à discréditer une approche du reiki au profit d'une autre. J'aime la diversité dans le reiki, c'est ainsi qu'il témoigne de toute sa richesse. Parmi les différentes approches du reiki, j'apprécie tout particulièrement celle du reiki japonais et je ne souhaite pas faire de tort aux personnes qui comme moi apprécient cette approche. Je cherche juste à faire preuve d'un peu d'objectivité et de recul et à présenter une façon d'aborder l'histoire du reiki peut être originale et atypique, mais en aucun cas polémique. Il s'agit juste de réflexions personnelles, je ne cherche pas à imposer une vérité que je ne possède pas, mais à partager cette réflexion.

Lorsqu'on lit Frank Arjava Petter, on se rend rapidement compte qu'il part du principe que ses interlocuteurs sont honnêtes. Jamais une seule fois il ne cherche à vérifier les informations qui se présentent à lui, il les considère a priori comme des faits historiques. Par exemple lorsqu'il se rend au mémorial Usui, au lieu de vérifier, comme tout bon historien rigoureux le ferait, à qui appartient la concession, depuis quand, ... il ne fait que se recueillir sur la tombe, en brûlant de l'encens et en dessinant le symbole du maître. Autre exemple, le manuel de Usui fourni par Kimiko Koyama est en japonais moderne. Jamais personne n'a vu de version ancienne dont l'analyse du papier, de l'encre utilisée, et de leur vieillissement, aurait constitué une preuve plus tangible. Dans notre cas, il n'existe aucune preuve qui démontre que ce manuel a bien été écrit par Usui. Le seul document ancien que Frank Arjava Petter nous a communiqué est une photo de Usui qu'il a reçue de Mr Oishi, ce qui d'un point de vue purement historique n'apporte rien de nouveau en matière de reiki.

Un fait étonnant concernant l'histoire japonaise du reiki est l'absence de documents d'époque témoignant des activités de Mikao Usui. Si l'on prend l'exemple comparable de Mokichi Okada, contemporain de Usui, fondateur d'une technique plus ou moins similaire au reiki, le johrei, on trouve de nombreux documents d'époque. Cette absence de documents est d'autant plus étonnante que le mémorial présente Usui comme un véritable sage, très connu, ayant enseigné sa méthode à plus de 2000 personnes. Cela aurait dû laisser de nombreuses traces, des papiers divers, des correspondances, mais il n’en est rien.

Je dois avouer que je n'ai jamais trouvé cette histoire de mémorial très crédible. Je n'ai encore jamais vu de stèle sur laquelle il était écrit un véritable roman, racontant la vie de la personne, donnant des informations sur sa famille, et même des éléments d'enseignements spirituels. J'ai toujours trouvé cela trop beau pour être vrai. De plus, partout où le reiki est enseigné, il se développe de façon débordante, comme c'est d'ailleurs le cas au Japon depuis sa ré-introduction. C'est tout à fait normal, c'est une méthode spirituelle à la fois simple et efficace. Comment expliquer, que le reiki n'ait pas connu ce développement débordant au Japon, mais au contraire, que son développement soit resté à un niveau confidentiel comme le prétendent les personnes qui se réclament de Usui, aujourd'hui au Japon. Cela aurait pu être une volonté au départ, mais je le rappelle, selon le mémorial, Usui aurait enseigné sa méthode à plus de 2000 personnes en seulement quatre ans. L'histoire racontée par James Deacon, à savoir qu'un ouvrier à la retraite habitant Tokyo, aurait prétendu avoir fait parti de l'équipe qui a érigé cette stèle en octobre 1985, n'est peut être qu'une rumeur (ou peut être pas), mais elle est en tout cas aussi crédible que les thèses généralement admises aujourd'hui.

On sait que l'une des forces du Japon depuis son ouverture sur le monde est d'importer des choses d'occident, de les étudier, de les améliorer autant sur le plan des fonctionnalités que sur le plan de la qualité, pour ensuite les réexporter en occident. Pourquoi ne pas appliquer cette méthode au reiki ? Il suffit de raconter l'histoire que tous les Occidentaux ont envie d'entendre, de faire de Usui quelqu'un de connu, proche de ses contemporains célèbres, comme Morihei Ueshiba (aikido), Onasiburo Deguchi (religion omoto), Mokichi Okada (johrei) , Jigoro Kano (judo), Toshihiro Eguchi. De prendre des techniques de qi qonq, de les modifier un peu, et de leur donner des noms japonais (on raconte parfois que Usui pratiquait le kiko, version japonaise du qi qonq, en réalité, le mot qi qonq est un terme générique utilisé en Chine seulement depuis les années 50 pour parler de différentes pratiques énergétiques, par exemple le dao yin, le kiko n'existe quant à lui que depuis les années 70 au Japon), de donner des noms japonais à des techniques introduites par Takata, d'emprunter des pratiques au seitai et au johrei.

Je ne suis pas historien, je n'ai pas fait d'études de terrain au sujet de l'histoire du reiki. Je n'ai pas la moindre idée de ce que peut être la véritable histoire du reiki. Mais ce qui est sur, c'est qu'au sujet d'un certain nombre d'aspects, l'histoire développée depuis la mode du reiki japonais (que j'expose d'ailleurs sur ce site), n'est pas plus crédible que l'histoire racontée par Takata. Le reiki japonais dit "traditionnel", n'est pas le reiki qui était pratiqué par Usui mais une invention marketing moderne. Il est fréquent de constater que les écoles de reiki japonais empruntent des enseignements ou des conceptions à l'alliance reiki, William Rand, ou Barbara Ray, en les attribuant à Usui, utilisent les chakras alors que ce concept n'avait pas été importé au Japon du temps de Usui (par exemple dans la technique chakra kassei kokyu-ho). Toutes les écoles de reiki japonais utilisent des techniques empruntées au qi qonq alors que, contrairement à d'autres pratiques d'origine chinoise, par exemple l'anma, qui sont pratiquées depuis plus de 1000 ans au Japon, ces pratiques ont été importées au Japon il y a moins de 40 ans. Hatsurei-ho n'a pas pu être la pratique centrale de l'enseignement spirituel d'Usui pour la simple raison que certains éléments essentiels de cette pratique ne faisaient pas partie de la panoplie spirituelle du Japon à cette époque.

Le fait que le reiki dit traditionnel ne soit pas traditionnel, n'a en soi pas d'importance. Le reiki tibétain n'a rien de tibétain, ça n'empêche pas le fait que cette pratique apporte des choses intéressantes au reiki. Cela devient un problème lorsque le reiki traditionnel est un prétexte pour dénigrer les autres formes de reiki, parce qu'une filiation et un enseignement sont sensés être plus authentiques que les autres, parce que le reiki occidental est trop commercial, alors que les maîtres de reiki japonais pratiquent dans l'ensemble des tarifs similaires aux autres maîtres. Je crois que le pire est atteint lorsque l'on joue avec la peur des gens, en affirmant par exemple que l'énergie dans une lignée occidentale est plus faible, ou que les initiations sont plus faibles, alors qu'en réalité une initiation sera forte si le maître est doué et surtout si l'élève est prêt à la recevoir, quelque soit la tradition ou la filiation. De plus une initiation n'est jamais ratée, il est toujours temps de développer sa capacité à canaliser le reiki, par exemple en pratiquant régulièrement l'auto-traitement ou joshin kokyu-ho.